Devant les craintes qui suscitait la pandémie mortelle de COVID-19 en mars dernier, l’Académie canadienne des arts et des sciences de l’enregistrement (CARAS) n’a eu d’autre choix que d’annuler à la dernière minute les festivités de la Semaine des JUNOS et son apothéose, la cérémonie de remise des prix JUNO à Saskatoon.
En dépit de toute la planification, du soutien financier octroyé par les organismes gouvernementaux et de l’aide fournie par de nombreux commanditaires — sans parler de l’enthousiasme suscité par le retour des JUNOS dans les Prairies — l’organisation à but non lucratif a dû annuler les festivités pour le bien commun.
Personne ne s’attendait à ce que les mesures de santé et de sécurité et la fermeture des entreprises et de la frontière canado-américaine durent aussi longtemps et qu’un nouveau virus très contagieux dévaste l’industrie de la musique. Mais ce fut le cas. Et ce à tous les niveaux, car il a emporté le gagne-pain des musiciens, de même que celui des équipes techniques, agents, promoteurs, gestionnaires de salles de spectacle, sans oublier les journalistes indépendants qui couvrent la scène musicale.
« C’est une époque très éprouvante pour d’innombrables entrepreneurs et travailleurs autonomes de notre secteur. Ils n’ont pas pu travailler ou toucher un revenu », déclare Erin Benjamin, présidente et directrice générale de l’Association canadienne de musique sur scène. « Plusieurs n’ont pas pu se prévaloir des mesures d’aide fédérales et plusieurs gérants de salles de spectacle n’ont pas pu souscrire d’assurance ou la renouveler à un taux abordable. Ainsi, la pandémie a entraîné une pléthore de problèmes et d’effets indésirables. »
Après quelques mois, réalisant que le coronavirus ne disparaîtrait pas de sitôt, la CARAS se résignait à produire une version en ligne des Prix JUNO pour annoncer les lauréats de 2020, le tout s’apparentant presque à un appel nominal de 90 minutes. Il n’y a pas eu de remise de trophées ni de discours d’acceptation. Pas de fla-fla, pas de tapis rouge, pas d’afters débridées.
Pourquoi n’a-t-on pas simplement retardé la remise des prix ou tenu la 49e édition en 2021? Principalement parce que l’année 2021 marque le cinquantième anniversaire des JUNOS. Et Toronto, berceau de la célébration annuelle de l’excellence dans la musique canadienne, doit accueillir l’événement, qui y vit le jour il y a 50 ans sous le nom de Gold Leaf Awards.
En outre, si l’année 2020 nous a prouvé une chose, c’est que l’absence de tournées et de concerts traditionnels n’a pas empêché la musique d’apporter un immense réconfort à des millions de personnes depuis le début de la pandémie. Les musiciens ont appris à établir un contact virtuel avec leur public. S’ils se sont tout d’abord produits gratuitement sur Facebook ou Instagram durant la première période de confinement par amour du métier, la donne a changé. Nombre d’entre eux vendent maintenant des billets par l’entremise de plateformes comme Side Door, Sessions Live, Nugs, Juju Live et Ticketmaster.
Les concerts au volant et les spectacles socialement distanciés à capacité limitée se font plus rares en ce moment, l’hiver s’étant installé et les consignes d’éloignement physique changeant constamment, mais les concerts virtuels représentent toujours une source de revenus pour les artistes, ainsi que pour les salles qui ont su s’adapter.
« Aux quatre coins du pays, la situation est on ne peut plus désespérante, mais nous restons très optimistes en raison des nombreux aspects positifs de cette épreuve : des collaborations tout à fait inespérées ont vu le jour et des gens ont trouvé des solutions qui ont assuré la survie de leur modèle économique, explique Erin Benjamin. Vous gérez une salle de spectacle? Eh bien, peut-être avez-vous amélioré votre offre de plats à emporter et que vous diffusez des concerts en ligne. Nous travaillons également avec les associations des secteurs les plus touchés, comme l’Association des hôtels du Canada et les secteurs du tourisme, de l’hôtellerie et des voyages, eux aussi décimés par la crise sanitaire. Avant la pandémie, nous n’aurions jamais songé à travailler avec ces organisations. »
En effet, les gens se sont rapidement adaptés à la « nouvelle normalité », s’accrochant à l’espoir que les concerts tels que nous la connaissons reviendront cet été. Le Festival musique et arts Osheaga doit avoir lieu du 30 juillet au 1er août 2021 au parc Jean-Drapeau, à Montréal. Le festival folklorique Mariposa est prévu du 9 au 11 juillet à Orillia (Ontario) au parc commémoratif J.B. Tudhope. De nombreux spectacles en salle ont également été reportés, comme ceux de Sebastian Bach, dont les concerts débuteront au Canada au Commodore Ballroom de Vancouver le 31 mai, ou la tournée de The Weeknd, qui débutera fin juin. Sous toute réserve, bien entendu.
« Je suis très optimiste, et certaine que les événements publics reprendront dès qu’il sera possible de le faire en toute sécurité, déclare Erin Benjamin. Et à mesure que les consommateurs reprendront confiance, les concerts deviendront l’une de nos plus grandes forces. Nous devrons reconstruire et redresser l’économie nationale et nous le ferons en musique, en organisant des fêtes et des festivals comme on n’en jamais vus auparavant! »
Photo : Sarah McLachlan anime les Prix JUNO 2019 à London. Crédit : Ryan Bolton